Artiste plasticienne engagée dans une pratique qui interroge la mémoire, la survivance et la fragilité du temps, je cherche à mettre en lumière ce qui reste, ce qui manque et ce qui pourrait advenir.
Ma démarche relève avant tout de l’observation. A ce titre, j’enquête, je collecte, je contemple, je dessine, je photographie chaque détail qui pourrait par sa seule présence raconter une histoire. C’est principalement par la photographie argentique que je construis mon travail dans lequel je m’applique à saisir un spectre, un instant qui n’apparaîtra plus jamais, renvoyant au fameux « ça a été » de Roland Barthes : une apparition créée par la lumière qui devient image puis se matérialise. L’image photographique sert alors de point de départ pour des expérimentations plus poussées. En l’associant avec d’autres recherches dessinées, installées, imprimées, etc je cherche à restituer, même partiellement, l’atmosphère qui se dégage des territoires suspendus que je traverse.
Il ne reste presque aucune partie de notre monde terrestre qui n’ait été foulée par l’humanité, nous marchons forcément dans les pas d’un autre. Le territoire que nous arpentons est une extension de nous-même et de nos semblables, modelé par les générations qui nous ont précédé, il porte en lui les marques de nos actions.
Le paysage, les bâtiments, les objets sont des témoins de notre passage. Nous y laissons des «fantômes réels» par lesquels nous survivons même après notre disparition. Chaque trace laissée, quelle que soit sa forme, est un indice précieux pour raconter ce qui nous devance et ce qui nous suivra. Nous déambulons dans un monde jonché de stigmates qui contribuent à nous façonner.
J’aime les espaces en transition, latents, où le temps semble se ralentir, là où se rencontrent l’avant, le maintenant et l’après. J’investis donc des territoires aux histoires singulières qui questionnent forcément ma place et celle des autres. Je souhaite témoigner des enjeux de l’époque que je traverse. Ainsi, des notions telles que celles de Gestalt, de Nachleben ou de solastalgie prennent une part très importante dans mes recherches. Concrètement, une partie de ma pratique plastique se questionne sur l’histoire collective ou personnelle, l’autre sur la question écologique et la destruction de notre environnement. C’est aussi la question de l’oubli qui me tient à cœur car certains pans de l’histoire intime ou globale tendent à disparaître dans le présent. Je veux faire parler les choses qui s’effacent, rendre visible ce qui ne l’est plus et ainsi réactiver une mémoire oubliée ou en phase de l’être.